Les livres défient le temps

Les manuscrits de la Librairie des ducs de Bourgogne sont de véritables machines à remonter le temps. Ils nous donnent un aperçu unique sur le XVe siècle, la conception du monde de leurs propriétaires et nous invitent à observer les personnages historiques sous un angle différent.

Sauvés des flammes et de la neige

Au XVe siècle, la Librairie des ducs de Bourgogne est incontestablement l’une des plus prestigieuses au monde. Mais cette exceptionnelle collection de manuscrits a souffert des outrages du temps. Plusieurs d’entre eux ont toutefois résisté aux incendies et aux pillages.

Au cours de l’hiver 1731, un violent incendie détruit presque intégralement le palais du Coudenberg dans lequel est conservée la collection de manuscrits. Les ouvrages les plus prestigieux sont jetés par le personnel depuis les fenêtres de la tour du palais et s’écrasent dans la neige. Les autres périssent dans les flammes. On ignore le nombre de manuscrits ainsi perdus.

Aujourd’hui, la conservation de quelque 300 de ces manuscrits relève pratiquement du miracle. En 1477, la bibliothèque ducale comptait plus de 900 manuscrits. Aujourd’hui, six siècles plus tard, environ un tiers d’entre eux sont toujours conservés à KBR. Il est exceptionnel qu’une collection de livres soit conservée aussi longtemps dans son ensemble.

Miroir d’une époque polymorphe

C’est un petit miracle que la collection ait survécu à cette époque turbulente et soit toujours en excellent état des centaines d’années plus tard. Mais ce n’est pas seulement l’histoire physique de ces livres qui est fascinante, ce sont également les histoires qu’ils renferment Ces ouvrages sont une véritable mine d’informations sur leurs propriétaires mais également sur l’époque à laquelle ils ont été rédigés.

La collection de manuscrits des ducs de Bourgogne est le témoin privilégié d’une époque durant laquelle le Moyen Âge cède progressivement la place à l’ère moderne. Cohérente par son ensemble, cette bibliothèque dévoile également toute la richesse d’une époque polymorphe.

À cet égard, les manuscrits du XVe siècle ne diffèrent pas tellement des livres du XXIe siècle : on y trouve des livres pour apprendre, pour découvrir le monde ou simplement pour le plaisir de lire.

Toutefois, une différence de taille s’impose : les livres des ducs de Bourgogne ont aujourd’hui acquis une dimension historique. Ils nous en apprennent plus sur les préoccupations de la fin du XVe siècle et sur les valeurs de leurs mécènes. Ils nous montrent, par exemple, le rôle extrêmement important que la religion joue au XVe siècle, ce qui contraste fortement avec la plupart des livres d’aujourd’hui.

La religion sous le feu des projecteurs

Un tiers des manuscrits de la Librairie des ducs de Bourgogne sont des livres à caractère religieux. On y découvre des textes mystiques et ascétiques comme la Cité de Dieu de saint Augustin, les œuvres de Jean Gerson ou de Grégoire le Grand.

Profondément religieux, tourmenté par l’espoir d’entreprendre une croisade, Philippe le Bon multiplie les commandes de livres « de Foi » ou ouvrages destinés à la prière privée, comme les missels, les bréviaires ou les psautiers. Les livres d’heures sont eux aussi très populaires.

Les livres d’heures sont des livres de prières destinés aux laïcs, c’est-à-dire des personnes n’appartenant pas au clergé. Leur contenu est toujours plus ou moins semblable : calendrier des principales fêtes religieuses, extraits des Évangiles et prières adaptées aux différentes « heures » canoniales (d’où leur nom). C’est surtout par la richesse de leurs illustrations que se démarquent ces ouvrages, d’usage quotidien dans une société profondément religieuse. Malgré leur caractère « sérieux », ils contiennent souvent des illustrations où la fantaisie, voire la satyre, peuvent côtoyer les images pieuses ; les marges offrant un espace de liberté aux enlumineurs.

Les Heures Tavernier. Pays-Bas méridionaux, XVe siècle. ms. IV, fol. 71r Annonciation

Une vaste vision du monde

Tous les livres ne sont pourtant pas consacrés à la religion. Les ducs de Bourgogne ont également de nombreux autres intérêts. Dans la Librairie, textes essentiels de la littérature médiévale et auteurs antiques côtoient les adaptations servant la propagande ducale. Les rêves de croisade et l’attachement à l’esprit chevaleresque rencontrent l’humanisme naissant. D’autres textes renvoient plus directement au contexte bourguignon. L’intérêt pour le Proche-Orient, lié aux rêves de croisade, s’y trouve bien présent. Tout comme les traités évoquant les ascendances légendaires des ducs avec des figures prédominantes comme Alexandre le Grand, le roi Arthur, Charles Martel ou encore Charlemagne.

Les plus anciens ouvrages remontent au XIIIe siècle et les plus récents datent de la fin de l’époque féodale et des débuts de l’humanisme. Beaucoup ont été translatés du latin vers le français et retranscrits à la demande expresse du duc par des copistes de renom comme Jean Miélot, Jean Wauquelin ou David Aubert. La Librairie des ducs de Bourgogne témoigne donc clairement d’une vaste vision du monde.

Xénophon, Hiéron (traduction française de Charles Soillot). Pays-Bas méridionaux, XVe siècle. ms. IV 1264, fol. 1r Présentation de l’ouvrage à Charles, comte de Charolais

Venez visiter le KBR museum, où le temps s’est arrêté, et admirez de vos propres yeux la diversité du XVe siècle.

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