Irina, Sil, Anouk et Lotte travaillent à KBR comme assistants en conservation-restauration pour le projet Les estampes européennes de Dürer à Rembrandt. Ils blogueront régulièrement ici sur leur job.

Cette semaine : comment enlever d’anciennes colles ?

 

Un travail délicat

Aujourd’hui nous vous parlons d’une des étapes les plus délicates dans notre projet : enlever des anciens rubans adhésifs. Une tâche délicate qui requiert de multiples précautions. C’est une étape importante qui nécessite beaucoup de temps lors du reconditionnement des gravures sur des montages non-acides. Bref, un travail à ne pas faire dans la hâte.

 

Techniques anciennes

Depuis les années 1850 jusqu’aux années 1980, les conservateurs de la Bibliothèque royale de Belgique tentaient de conserver au mieux de nombreuses estampes du Cabinet des Estampes. Ils procédaient en attachant les œuvres par le biais de charnières sur un carton en utilisant généralement du papier gommé pour ces charnières. Le carton employé comme support pour l’estampe, correspondant à certaines dimensions, facilitait la conservation des estampes dans des boîtes sur mesure. Ce procédé permettait aussi aux visiteurs de consulter les estampes sans les toucher directement.

 

Tout est susceptible d’être amélioré

Nous savons que nos prédécesseurs utilisaient les meilleures techniques d’accrochage disponibles à leur époque. Il s’avère toutefois que ces techniques sont aujourd’hui surannées voire parfois néfastes pour les estampes. On a constaté après avoir effectué des tests, que le carton utilisé était acide, ce qui peut attaquer les estampes. Vous avez déjà pu lire dans notre premier blog comment on résout ce problème.

Un deuxième problème est lié au fait qu’à long terme, les colles utilisées pénètrent dans le papier, en altèrent la couleur ou le durcissent. Lorsque le ruban adhésif est fait d’un matériau acide, il peut aussi provoquer une acidification locale de l’œuvre sur papier. Pire encore, dans certains cas, il s’est avéré que l’estampe avait été attachée sur le support moyennant plusieurs couches de ruban adhésif. Ce procédé provoque une tension et des déformations du support en papier de l’estampe.

 

  

Gravure d’après une peinture d’Antoine Van Dyck, avant et après l’enlèvement des anciens rubans adhésifs (n° inv. S.I 14 434).

 

Quelles sont les solutions ?

Comme vous pouvez le deviner, la manière de retirer la charnière dépend de la nature de la colle et du papier sur lequel l’estampe a été attachée. Dans certains cas, il vaut mieux gratter la couche supérieure, dans d’autres cas, on utilisera une substance humide pour un résultat optimal, notamment de l’eau déminéralisée ou différentes sortes de gels pour diluer la colle, tels que des gels à base de cellulose.

Parfois le papier est trop fin ou trop fragile et la colle du ruban adhésif s’est glissée entre les fibres du papier. Si tel est le cas, nous essayons d’enlever un maximum de résidus sans rien endommager, mais le plus souvent, une toute fine couche reste (malheureusement) collée sur le papier.

Il arrive qu’une fois l’ancienne colle enlevée, du texte ayant été recouvert auparavant réapparait. Dans certains cas, cela nous permet de découvrir des informations intéressantes !

 

 

L’art du collage

À ce stade, vous vous demandez probablement comment attacher, selon les règles de l’art, une ancienne gravure sur un carton non-acide.

Il est d’abord essentiel de choisir les bons matériaux. Nous voulons évidemment éviter que les œuvres d’art subissent une nouvelle dégradation. Nous veillons aussi à ce que le restaurateur futur puisse retirer le plus facilement possible nos charnières si cela s’avère nécessaire. Pour cette raison, nous utilisons des colles à base d’amidon et de cellulose, aisément détachables en les humidifiant légèrement. Selon ce principe (réversibilité), nous rendons donc nos interventions réversibles.

Les colles que nous choisissons, sont déposées sur de petites charnières de papier Japon que nous attachons ensuite sur les montages. Une fois ce travail fini, nous pouvons nous attaquer à une autre estampe !

 

Plus d’informations

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Ce projet a été réalisé avec le support du Foundation Roi Baudouin et le Fonds Baillet Latour.